Trois pourcents des malades en soin souffrent d’hypocondrie. Cela fait déjà beaucoup de malades. Mais en fait, la banalisation du terme concerne aujourd’hui des millions d’angoissés qui, au moindre symptôme, se ruent vers leur médecin ou dans une pharmacie. Internet n’a pas arrangé le problème. La vie douillette et le confort non plus !
« Il marche, dort, mange et boit comme les autres, mais cela n’empêche pas qu’il soit fort malade » Molière, Le malade imaginaire.
L’hypocondrie ne date pas d’aujourd’hui. Plus le pays est riche, et plus le bataillon s’agrandit ; à tous les âges mais avec une forte augmentation en vieillissant.
C’est une maladie simple à comprendre. On est face à une interprétation erronée de symptômes physiques réels, qui persistent, même si le médecin affirme le contraire. Celui-ci est toujours hanté par le risque d’erreur médicale, donc agit avec précaution. Encore plus de nos jours avec les procès en responsabilité….
Pourquoi est-on hypocondriaque ?
C’est d’abord clairement une sorte « d’appel au secours » pour calmer les angoisses ou tout simplement continuer à exister dans un couple qui ronronne.
C’est une façon de se rassurer devant les angoisses de mort inconscientes.
C’est aussi une façon de répondre à une certaine forme d’injustice de la vie : « Ce n’est pas juste, avec tout l’argent que j’ai qu’on me soigne comme les autres ».
La génétique n’a rien à voir ; il n’y a pas d’origine familiale prouvée. On retrouve parfois une interaction avec la dépression qui est alors parfois difficile à diagnostiquer.
L’hypocondrie dans sa forme la plus répandue n’est pas grave ; sauf pour l’équilibre des finances de l’assurance maladie ! En revanche la vraie hypocondrie qui perturbe la vie est beaucoup plus préoccupante.
Un mot sur l ’hyper hypocondrie, hyper grave qui porte un nom bizarre : Le syndrome de Münchhausen. Le malade simule la maladie pour attirer l’attention. Cela peut aller très loin puisque la personne qui en souffre arrive à tromper les chirurgiens. Le nombre de cicatrices est souvent le seul signe d’alerte pour les médecins. Cette maladie a même une forme gravissime lorsqu’elle se fait par procuration. Il s’agit, la plupart du temps, d’une mère extrêmement dévouée, attentive et le plus souvent habituée au milieu médical (infirmière, kinésithérapeute, etc.) qui « promène » son enfant de services hospitaliers en consultations de pointe, et malgré le temps qui passe et la compétence des soignants, la maladie du petit reste impossible à diagnostiquer. C’est la mère qui induit elle-même ce mal, qui n’est pas facile à diagnostiquer… souvent trop tard !
Quelle que soit la cause, l’hypocondriaque souffre, alors que faire ?
D’abord l’écouter, en sachant que c’est souvent pour certains coupoles ancien de communiquer, de faire preuve d’attention. Comme dans tous les symptômes d’origine « psychiatrique », c’est la fréquence et les conséquences en terme de médicaments et de consultation qui sont à prendre en compte. La prise de conscience de ce phénomène n’est pas facile à accepter surtout quand elle touche les deux membres du couple. Elle est également préoccupante quand elle concerne la relation entre une mère et son enfant.
Il faut aussi supprimer le recours à internet et ses conseils préfabriqués et ne pas hésiter à changer de médecin s’il est trop complaisant… Mais le conserver s’il commence à vous « remuer » un peu devant la fréquence trop importante des visites. C’est aussi – théoriquement – au pharmacien de signaler les abus de traitement. Le seul traitement de l’hypocondrie douloureuse est d’avoir recours à une professionnel psychiatre ou psychologue.
En fait c’est à l’entourage de faire la balance entre un symptôme qui peut faire sourire et un réel problème médicale…
Docteur Jean-François Lemoine